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Une BD comme moyen de communication en biologie synthétique ?

Une bande dessinée sur la biologie synthétique ou une expérience à l’issue imprévue

Le « Blick » critique la bande dessinée traduite par le Forum Recherche génétique.

Préambule

Depuis 2005, le Forum Recherche Génétique porte un intérêt soutenu à la biologie synthétique. De plus, plusieurs de ses membres ont eu l’occasion d’entrer personnellement en contact avec Drew Endy, l’un des leaders dans ce nouveau champ d’investigation. Afin de présenter son domaine de recherche à un plus large public, le biologiste californien, qui cultive des formes inhabituelles de collaboration, a choisi de réaliser une bande dessinée en collaboration avec le dessinateur Chuck Wadey. Celle-ci s’intitule « Adventures in Synthetic Biology ».

Le Forum decida de faire de cet ouvrage, loué dans les colonnes de la revue scientifique «Nature», une traduction allemande, ceci dans l’espoir de générer le débat au sujet d’un domaine de recherche encore largement inconnu.

Une place en page titre

Le Forum distribua la version allemande de la bande dessinée lors de la «SB.03», troisième réunion internationale sur la biologie synthétique, qui eut lieu à Zurich du 24 au 27 juin 2007. Bien qu’appréciable, la portée de l’évènement ne fut pas celle que l’on souhaitait. Le journal bernois "Der Bund" parla d’une "tentative ratée" et la Wochenzeitung "WoZ" cita en titre "L’apprenti sorcier" de Goethe ("In die Ecke, Besen! Besen!" "Au coin, Balai! Balai!").2 En résumé, la première fois, et jusqu’ici la seule, où le Forum Recherche Génétique visa la une, l’expérience ne fut pas vraiment couronnée de succès.

Réflexion …

Le Forum decida alors de faire l’analyse de l’échec de cette tentative de communication. Il chargea un groupe de la Haute Ecole de Lucerne d’étudier la manière dont différents groupes «cibles» accueilleraient et comprendraient un tel ouvrage. A cette fin, cinq discussions de groupe eurent lieu : deux avec des gymnasiens issus de deux sections différentes (Biologie et Arts créatifs), deux avec des personnes actives professionnellement dans les domaines de la biologie ou de l’ingénierie ainsi que dans celui de la publicité et la dernière avec un groupe d’adolescents suisses comparable à un groupe de jeunes américains des Etats-Unis, celui-ci constituant un groupe contrôle.

… Résultats …

Une critique exprimée par tous les groupes porta sur la contradiction entre le caractère infantile du langage utilisé et l’extrême complexité du domaine scientifique nuisant à l’envie de s’impliquer dans la lecture. A celle-ci s’ajoutait une irritation liée au mélange de faits avérés et d’éléments fictifs. Enfin le choix du genre fut également jugé malheureux, la forme de science fiction prêtant à la biologie synthétique un caractère douteux et dangereux portant atteinte à sa crédibilité et renforçant les préjugés négatifs.

L’analyse mit également en évidence un fossé profond entre les générations. Alors que les adultes approchent la bande dessinée avec leurs connaissances préalables et la charge émotionnelle liée au thème du génie génétique, la ressentant alors comme menaçante et dissuasive, les gymnasiens interprétent et lisent les images en tant que langage propre au medium bande dessinée. Dans ce sens, ces derniers trouvèrent les images divertissantes, tout en exprimant des doutes quant à leur aptitude à communiquer des connaissances telles que des connaissances scientifiques.

Finalement l’analyse fit ressortir une différence culturelle marquée entre les jeunes américains des Etats-Unis et leurs pairs suisses : le style et les images plaisent aux teenagers américains, qui louent l’harmonie de l’expression, du dessin et du choix des couleurs, alors qu’ils n’exercent aucun attrait sur les jeunes suisses.

…et les recommandations

Les résultats de l’étude lucernoise montrent l’importance, lors d’un projet de bande dessinée, de considérer avec soin les différences culturelles, comme par exemple entre Suisse alémanique, romande et italienne. En Suisse alémanique en particulier, l’usage d’histoires illustrées pour communiquer des connaissances s’est heurté au septicisme. Il est alors recommandé d’être prudent quant à l’adaptation de bandes dessinées provenant d’autres contextes culturels.

Il convient également de tester l’environnement dans lequel l’usage d’une bande dessinée est indiqué. Si un tel moyen est proposé dans le cadre de l’enseignement en classe et ceci en guise d’alternative à un autre moyen pédagogique, il sera apparemment mieux accepté que s’il fait l’objet d’un devoir à la maison ou d’une lecture à effectuer pendant le temps libre.

Finalement, le groupe de recherche lucernois recommande de vérifier que le groupe «cible» a un réel intérêt pour le sujet traité car, en l’absence de curiosité et d’envie, même le meilleur des dessins animés n’atteindrait pas son but.

Enfin, les données de l’analyse de «Abenteuer im Reich der Synthetischen Biologie» constituent un fil conducteur pour la conception et la réalisation de bandes dessinées à des fins didactiques.

Septembre 2013

Références

  • Endy D, Deese I and The MIT Synthetic Biology Working Group (2005). Adventures in Synthetic Biology. Nature 438:449 – 453. Lien
  • Hänggi M (2007) In die Ecke, Besen! Besen! WOZ. Die Wochenzeitung. Lien
  • Hangartner U, Keller F und Oechslin D (2012) Sachcomics. Ein Manual für die Praxis. Hochschule Luzern, Design & Kunst Lien

Auteurs : Dr Lucienne Rey

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